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Par le dessin, la vidéo, l’installation et la musique, Nicolas Gaillardon développe un univers à la temporalité insaisissable, que l’on peut lire comme une vision archéologique d’un présent en transition. L’artiste nous plonge dans une ambiance de road movie futuriste, où ne subsistent plus que les traces d’un monde que nous pouvons reconnaître comme le nôtre. Il ne s’agit pas de science-fiction. Juste d’un léger décalage avec le réel et la sensation indéfinissable d’arriver juste après ce qui a balayé l’espace du dessin de toute présence humaine. 
Les paysages de Nicolas Gaillardon sont en effet des déserts. Sur la surface blanche de la feuille ou de l’écran émergent quelques fragments d’asphalte, des lignes de trottoirs, de parkings ou de playgrounds, comme autant de signes d’une urbanité livrée à elle-même. Dans ces espaces délaissés, les objets clairsemés se sont imposés et contribuent à instiller une angoisse diffuse : leur coexistence et leurs agencements improbables semblent ourdir un plan indéchiffrable qui pèse comme une menace sourde.
 Le passage du dessin à l’animation amplifie cette atmosphère paranoïaque, renforcée par les nappes sonores de la musique qui dotent l’image d’une épaisseur supplémentaire et d’une temporalité dilatée. La répétition du mouvement fait écho à la répétition même des gestes, des comportements mécaniques et conditionnés de l’expérience contemporaine. 
Les oeuvres de Nicolas Gaillardon sont des évocations d’une humanité qui semble s’être perdue dans ses artefacts. Elles ont aussi la poésie mélancolique du souvenir. Partout y subsistent des bribes de nature, des brins d’herbe ou des roseaux balayés par le vent, comme un souffle de vie, une légèreté qui résiste à la pesanteur et à l’effacement.

 Delphine Masson  

 

 

Texte par Clément Sauvoy sur ALURING* THE ART SCENE

http://www.aluring.com/blog/2020/3/20/nicolas-gaillardon